Le re-commerce désigne la revente de produits d’occasion par des marques ou des plateformes spécialisées. Ce nouveau modèle constitue une alternative durable au modèle linéaire « produire, consommer, jeter ». De nombreuses enseignes l’intègrent désormais dans leur stratégie. Quels sont les avantages du re-commerce pour les marques ? Est-ce vraiment une alternative écologique ?
60 % des vêtements finissent dans des décharges ou des incinérateurs dans l’année qui suit leur production.
1- Qu’est-ce que le re-commerce ?
Une définition du re-commerce
Le re-commerce (ou reverse commerce) désigne l’ensemble des activités de revente, de rachat et de remise en circulation de produits d’occasion dans un cadre structuré, encadré et valorisé par des acteurs professionnels (marques, distributeurs, plateformes spécialisées).
L’objectif est de donner une seconde vie aux biens tout en garantissant traçabilité, qualité et parfois même une remise à neuf (reconditionnement, contrôle qualité, garantie).
Il s’agit de distinguer le re-commerce du marché de l’occasion.
42% des Français auraient déjà acheté un produit reconditionné.
En effet, le marché informel de l’occasion en ligne, reposant sur des plateformes comme Vinted ou Leboncoin, consiste en de la mise en relation directe entre particuliers.
Les marques ne contrôlent pas et ne tirent pas de bénéfice de ces transactions.
Au contraire, le re-commerce est porté par les entreprises elles-mêmes.
Ce sont les marques ou des plateformes spécialisées qui organisent la reprise et la revente de leurs produits ou de produits tiers, dans une logique d’économie circulaire, de fidélisation client et de durabilité.
Il s’agit d’une forme professionnalisée et encadrée du marché de seconde main.
Comment est né le re-commerce ?
Le terme a été inventé aux Etats-Unis en février 2005 par George F. Colony, dirigeant de Forrester Research, dans le contexte des tendances d’achat technologique post-bulle Internet. En France, le terme a fait son apparition en 2008 introduit par Martin Tobias puis repris en 2010 dans un article des Echos.
De plus en plus de consommateurs sont séduits par le re-commerce, soucieux de consommer de manière plus éthique et responsable.En effet, selon une de Happydemics, 42% des Français auraient déjà acheté un produit reconditionné.
Compte tenu du succès, de plus en plus de grandes enseignes et de grandes marques intègrent le re-commerce dans leur stratégie commerciale.
Des exemples de re-commerce
Le re-commerce concerne des produits que l’on appelle « reconditionnés ».
L’un des leaders du reconditionné en ligne est l’entreprise Back Market. L’enseigne est spécialisée dans la reprise de produits électroniques (tablettes, smartphones, ordinateurs …), que des réparateurs professionnels certifiés préparent pour la revente.
Autre exemple, avec le programme Decathlon Seconde Vie. L’enseigne de vente de produits de sport reprend du matériel sportif utilisé (vélos, équipements de fitness, etc.), le répare et le revend dans ses magasins ou en ligne, avec une garantie et une traçabilité.
Le domaine du luxe n’est pas en reste.
Dès 2020, Gucci avant lancé un partenariat à durée limitée avec la plateforme américaine de revente de luxe The RealReal. Le programme « Gucci x The RealReal« permettait de revendre des pièces Gucci dans un cadre encadré et authentifié.
Pour inciter les personnes à déposer des pièces et en acheter, Gucci et The RealReal proposaient de planter un arbre via l’ONG One Tree Planted.
2-Quels sont les avantages du re-commerce pour les marques ?
Le re-commerce représente bien plus qu’une tendance de consommation : il devient un levier stratégique pour les marques. Quels sont les avantages pour une entreprise à faire du re-commerce ?
Capter une part des revenus de l’occasion
Plutôt que de laisser les particuliers acheter et revendre leurs produits, le re-commerce permet aux marques d’organiser elles-même la reprise et la revente de leurs produits.
De ce fait, les marques captent une part de la valeur jusque-là réservée au marché de l’occasion entre particuliers.
Au lieu de générer de la marge qu’une seule fois lors de la vente initiale, la remise en circulation du produit rapporte à l‘entreprise une seconde marge tout en optimisant la durée de vie du produit s’il y a eu réparation et reconditionnement.
Un outil de fidélisation marketing
Les marques peuvent mettre en place des programmes de reprise, à l’instar de Gucci qui proposait de planter un arbre pour toute pièce reprise ou achetée en re-commerce.
Ces incitations peuvent être proposées sous forme de bons d’achats ou de bons de réduction pour que le client achète de nouveau auprès de la marque, soit en reconditionné, soit en neuf.
La relation client est renforcée autour de l’économie circulaire : vendre, reprendre, revendre.
Le re-commerce plutôt que l’occasion pour contrôler l’image de la marque
Plutôt que de laisser à des plateformes comme Vinted ou leBoncoin le soin de revendre les produits, les plateformes de re-commerce comme Back Market ou les programmes des marques peuvent proposer à la revente des produits valorisés.
Les entreprises maîtrisent la qualité des produits vendus, leur présentation ainsi que le prix. Cela évite les risques liés à la contrefaçon ou à la dévalorisation et garantit une expérience cohérente avec les standards de la marque.
Attirer de nouveaux consommateurs
Le re-commerce est une manière d’attirer un autre type de consommateurs. Cette cible est sensible aux enjeux environnementaux et plébiscite l’économique circulaire et durable pour leurs achats. Acheter des produits reconditionnés permet de valoriser la seconde main tout en bénéficiant de la qualité des produits et d’une garantie, inexistante en cas d’achat d’occasion auprès de particuliers.
Enfin, le re-commerce offre aux marques l’opportunité de renforcer leur storytelling autour de la durabilité et d’attirer ainsi une clientèle attentive à l’impact écologique, mais aussi aux économies !
3- Quels sont les enjeux écologiques du re-commerce ?
Le re-commerce n’est pas qu’un enjeu marketing, les bénéfices écologiques sont réels.
Réduire l’empreinte carbone des marques via le re-commerce
Le re-commerce constitue un levier concret pour réduire l’empreinte carbone des marques. Comment ?
Le re-commerce favorise l’allongement de la durée de vie des produits. Au lieu de jeter des produits car ils sont cassés ou ne plaisent plus, les marques les répare et leur offre une nouvelle mise sur le marché. Cette pratique prolonge l’utilisation des ressources déjà mobilisées lors de la production initiale.
Du fait de l’allongement de la vie de ces produits, il est possible de diminuer la production de produits neufs, ce qui a un impact environnemental direct lié à l’extraction de matières premières, au transport et aux procédés industriels.
En parallèle, le re-commerce contribue à la réduction des déchets textiles, électroniques ou autres. D’une part car les produits sont réutilisés plutôt que d’être jetés. D’autre part car moins de production neuve entraîne moins de production de déchets.
Le re-commerce agit également comme un frein à la surconsommation, en incitant les consommateurs à réutiliser et acheter des biens de seconde main plutôt qu’à consommer systématiquement du neuf.
Contribuer à l’économie circulaire
Le re-commerce s’inscrit dans une logique d’économie circulaire, puisqu’il permet de prolonger l’usage des produits déjà fabriqués au lieu d’en produire de nouveaux.
Cette logique d’économie circulaire augmente la durabilité des produits et favorise une consommation plus responsable.
En valorisant les ressources existantes, cette pratique optimise l’utilisation d’énergie et de matières premières. Le reconditionnement n’est pas une approche écologiquement neutre. Elle permet toutefois de réduire le gaspillage en prolongeant la vie de biens qui auraient pu être considérés comme des déchets.
Quand nous voyons les masses de déchets textiles dont plus personne ne sait que faire, le re-commerce apparaît comme une nécessité aujourd’hui.
Étude de cas : l’exemple du projet re-commerce Atacama
C’est sans doute dans le domaine du textile que le re-commerce apparaît comme le plus indispensable. La fast fashion a rendu abordable l’habillement pour le plus grand nombre, mais a également entraîné une surconsommation difficile à juguler.
La pollution textile constitue un véritable fléau. En effet, 60 % des vêtements finissent dans des décharges ou des incinérateurs dans l’année qui suit leur production.
Qu’est-ce que le projet Atacama ?
Au nord du Chili, la zone franche d’Iquique reçoit chaque année des dizaines de milliers de tonnes de vêtements usagés. Une petite partie est revendue en Amérique latine, mais la majorité finit illégalement déversé dans le désert d’Atacama.
Le désert d’Atacama est devenu un cimeterre textile où s’amoncellent des tonnes de vêtements jusqu’à former de véritables collines. Chaque année, plus de 40 000 tonnes de textiles sont abandonnées sur le sable de ce désert.
Face à cette absurdité environnementale, une initiative audacieuse est née : la plateforme Atacama RE-commerce. L’initiativée est portée par l‘agence de publicité brésilienne Artplan, en collaboration avec VTEX, Fashion Revolution et Desierto Vestido.
Le projet Atacama RE-commerce consiste à ramasser, trier, nettoyer et remettre en circulation les vêtements abandonnés dans le désert d’Atacama. Ces vêtements sont souvent en bon état, voire même neufs lorsqu’il s’agit d’invendus. Ces pièces sont proposées gratuitement à des consommateurs via une plateforme e-commerce. Les utilisateurs ne paient pas les vêtements, uniquement les frais d’expédition.
L’interface du site est pensée comme un e-commerce classique, ne dépaysant pas les internautes. Recommerce Atacama permet aux consommateurs du monde entier de « sauver » des vêtements abandonnés.
Quels sont les résultats du projet de re-commerce Atacama ?
Cette initiative a rapidement fait ses preuves : les 300 premiers articles mis en ligne ont été dévalisés en quelques heures, soulignant l’engouement et la nécessité d’une telle initiative.
Au-delà de la revalorisation des vêtements, le projet vise à sensibiliser à la surconsommation et à la crise environnementale provoquée par la fast fashion.
Il propose une alternative inspirante : trouver des solutions concrètes au problème causé par la surproduction, tout en créant des emplois locaux et en soutenant un modèle durable à long terme.
Conclusion :
Le re-commerce apparaît comme une solution gagnant-gagnant : il offre aux marques de nouvelles opportunités économiques tout en répondant aux enjeux écologiques d’ l’allongement de la durée de vie des produits.
L’exemple du projet Atacama illustre le potentiel d’une consommation plus circulaire et responsable. Mais ces initiatives vertueuses sont-elles de taille à lutter contre les dérives d’un e-commerce de masse, comme Temu ou Shein, aux conséquences écologiques catastrophiques ?